24 février 2023

Cher journal. Cher journal, je lis les traces du passé. Je lis les traces du passé dans tes pages. Les traces du passé dans tes pages sont des lignes. Dans tes pages sont des lignes de vie. Des lignes de vie qui me racontent. Qui me raconte à travers toi ? A travers toi je suis vivante, je suis vivante entre les lignes. Entre les lignes, la page blanche…
Cher journal, j’écris des traces du passé. J’écris des traces du passé dans tes pages, des lignes de vie que je me raconte entre les lignes, vivante à travers toi, au-delà de la page blanche.
Cher journal, je brise tes pages blanches de mes cris, je fragmente ma vie, j’entre dans les lignes du passé qui me racontent en traces, qui me lient à toi, cher journal.

L’invité de la semaine : TbPn – Les Stries De L’Arbre

L’esprit de l’arbre

Le nouveau groupe invité cette semaine (après Kino-Sounds le mois dernier), nous est présenté par Matthias. Merci d’accueillir maintenant la formidable formation TbPn ! Ce duo est un rubis à l’éclat miroitant, avec Xavier Camarasa au piano préparé & Matthias Mahler au trombone toujours prêt ! Ils nous proposent aujourd’hui Les Stries de l’Arbre, morceau composé par Xavier Camarasa, tiré de leur deuxième album : Mémoires de formes. Enregistré en 2019 par Jean-Charles Mouchet, l’album est déjà disponible sur Bandcamp, ainsi que le premier disque au titre éponyme TbPn. Ça se danse en cercles excentriques, rotation anti-horaire, à cloche-pied en marche arrière… Accroche-toi aux rhizomes !

Papi dit qu’une souche est un arbre dont la mémoire est à découvert. Celle de son saule l’a attendu au milieu de la petite place jusqu’à ce qu’il ait assez de force pour sortir s’asseoir au soleil et finir de se rétablir. La main de feuilles l’avait soigné et avait fait retomber sa fièvre pour de bon. À présent, la souche l’attendait au milieu de la placette. Papi s’est approché peu à peu. Il croyait voir encore l’ombre de son saule sur le sol et entendre le chuchotement des branches qui se frôlent. Mais le soleil envahissait tout à présent, le soleil et un silence de bois.

(…)

Papi raconte que s’asseoir sur une souche, c’est comme entrer dans l’arbre et voir tout ce qu’il a vu, arrêter le temps pour regarder à l’intérieur de l’arbre, et en nous aussi. Cette souche-là n’était qu’un tabouret pour un enfant de onze ans. Tout ce que cet arbre avait vu se réduisait à cette petite place. Mais soixante ans plus tard, papi se rappelle ce moment comme si c’était hier. Et à présent je me le rappelle pour lui.  » Demain ils viennent l’arracher. « 

Tina Vallès, La mémoire de l’arbre

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

Xavier au Pn & Matthias au Tb
TbPn, 2019
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.

17 février 2023

Cher journal, de combien de mues serai-je l’objet ? Le temps agit sur moi en sculpteur aveugle. Je sens ses mains froides modeler mon être en permanence, et régulièrement j’atteins un point de bascule ou aucun retour en arrière n’est envisageable. L’entropie, impitoyable gardienne du passé, veille aux portes de celui qui n’existe plus. Mais la mutation c’est autre chose encore, une transcendance rare, qui se travaille à long terme, et dont on ne réalise son accomplissement que bien longtemps après avoir franchi la frontière éthérée de l’impossible. Ces transformations profondes je les ai ratées, évitées, je suis passée à côté, mais je les ai aussi cherchées, je les ai convoquées, implorées parfois, guettées souvent, fantasmées follement. Aujourd’hui au seuil d’un possible voyage au long cours vers un avenir mystérieusement attendu, je suis prise d’un vertige sidérant. Et voilà, je saigne du nez…

L’éphéméride de la semaine : Orage à Tonnerre – part II

Tonnerre dans l’Yonne.

Retour dans nos annales pour un nouvel l’éphéméride, histoire de se rafraichir la mémoire. Cette semaine nous nous immergeons dans le disque Extension Des Feux, sorti en 2013, avec deux fidèles invités ♡ merveilleux ♡ : Marc Ducret à la guitare & Vincent Peirani à l’accordéon. Enregistré par Philipp Heck & Guillaume Dulac (coucou Guillaume ♡), co-produit par Romain Léo (big up Romain ♡), ce disque est composé de trois suites écrites par Frédéric, découpées en chapitres. Nous vous proposons la deuxième partie d’Orage à Tonnerre. Après le Bal des Faux Frères et leur Back In Black débridé du mois dernier, là encore ça se danse, mais cette fois-ci ce sera nu sous la pluie… Attention, risque de rhume !

5. FOXFIRE : aventures, missions, triomphes

Des années plus tard, devenue adulte, elle se rappellera la perspicacité du commentaire de Rita : quoique vous fassiez, que vous le fassiez seule ou non, à quelque moment que vous le fassiez, de quelque façon que vous le fassiez, pour quelque raison que vous le fassiez, quelque mystérieux soit le but dans lequel vous le fassiez, n’oubliez jamais que sur l’autre plateau de la balance il y a toujours le néant, la mort, l’oubli. Que c’est vous contre l’oubli.

Joyce Carol Oates, Confessions d’un gang de filles, 1993

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

EXTENSION DES FEUX
Journal Intime, 2013
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.

10 février 2023

Cher journal, je traverse l’hiver et la fatigue à la rencontre du désarroi ambiant. De loin en proche, le soleil semble se tenir à l’écart des cœurs et des âmes. Le gel atteint nos artères, éteint nos ardeurs, le vide étreint nos peurs. Certains, réels, subissent, endurent, tentent de résister, souffrent au-delà de la vie. La faim les engourdit, la fin les surprend. Ceux qui sont épargnés habitent des corps immobiles et dévitalisés, sourds, indifférents. Perdus sans balise, aucun espoir dans aucune promesse, l’aridité est leur vérité. Dans cet immense glacier humain désolé, une étincelle, une lueur vacille et se maintient. Je veux la protéger, alimenter le brasier de ce foyer impertinent, afin de voir un jour, ce soir, maintenant, cette flamme d’espoir devenir un immense feu de joie. Je suis une empathe.

L’avant-première de la semaine : Azy Brd

Retour vers le futur !

Un mois après un premier titre éponyme, nous revoici plongés dans le prochain disque de Journal Intime & Jérémie Piazza, Playtime, qui sortira le 07 avril 2023. En exclusivité et en avant-première, nous vous présentons Azy Brdprononcer [azy brd]. Quand nos arrangements s’éloignent d’une pièce originale par détours et raccourcis, on a pris l’habitude d’appeler ça un dérangement ! En voici un exemple typique, ce morceau se situe au carrefour (un jour d’embouteillages) des standards Lady Bird de Tadd Dameron, Lazy Bird de John Coltrane, et du Lover Man de Davis, Ramirez & Sherman. Ça se danse en sautillant, cabrioles autorisées, entrechats recommandés, et si tu filmes : fais tourner…

Ladybird

We fit together like two birds of a feather
The perfect combination and it couldn’t be better
If you just say the word, I’ll leave my lonely world
I’ll fly with you, ladybird

Just like a robin in the harbinger of spring
I’d have this urge to fly since you’ve given me wings
Please don’t you say goodbye, I’ll have to leave the sky
Just fly with me, ladybird

Tadd Dameron

Coccinelle

Nous nous emboîtons comme deux oiseaux d’une plume
La combinaison parfaite et ça ne pourrait pas être mieux
Si tu dis juste un mot, je quitterai mon monde solitaire
Je volerai avec toi, coccinelle

Tout comme un rouge-gorge dans le signe avant-coureur du printemps
J’aurais cette envie de voler depuis que tu m’as donné des ailes
S’il te plaît, ne dis pas au revoir, je vais devoir quitter le ciel
Vole juste avec moi, coccinelle

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

Journal Intime & Jérémie Piazza
Poll Pebe Pueyrredon, 2019
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.

03 février 2023

Cher journal, je sens que je suis au début de quelque chose. Je ne sais pas. Je cherche, je ressens, je rechercher, attentive aux interstices, à l’infime, avide du vertige, tendue par l’angoisse inévitable de ne rien trouver, pas même le silence, moins que le vide et l’ignorance. Qu’y a-t-il derrière ma peur ? J’espère y trouver un atome de vérité, le débris d’une délicatesse, l’authentique odeur d’une lumière vive, l’éclat du temps fragmenté… Rien que le grain d’un geste fou, que je pourrais faire germer en mon cœur, au chaud de mon corps, à l’abri de la fiction, authentique danse de vie, sève vigoureuse qui, plus tard, peut-être, passionnément, à la folie, deviendra pure énergie.

L’inédit de la semaine : 1er mouvement

La danse du crabe ?

Nous voici de retour en trio cette semaine avec une pièce inédite, youpi, enregistrée en public au cours d’un concert entièrement improvisé à l’Atelier des Bourdons le 15 janvier dernier. Énorme merci à Marie-Christine Mazzola & Gaël Ascal pour avoir organisé ce concert ♡ Et merci également aux merveilleux spectateurs de tous ages pour leur écoute si précieuse, c’était une première pour nous, et ce fut un bonheur immense ♡ De cette folle soirée nous sommes en train d’extraire une suite dont voici le premier mouvement. Alors oui, tout le monde dansait au concert, donc si tu restes assis devant ton ordi, c’est toi qui perds !

449

I died for Beauty —but was scarce
Adjusted in the Tomb
When One who died for Truth, was lain
In an adjoining Room—

He questioned softly « Why I failed »?
« For Beauty », I repliesd—
« And I —for Truth —Themself are One-
We Bretheren, are », He said—

And so, as Kinsmen, met a Night—
We talked between the Rooms—
Until the Moss had reached our lips—
And covered up —our names—

Emily Dickinson

J’étais morte pour la beauté, mais à peine
Etais-je installée dans la tombe
Qu’un autre, mort pour la vérité,
Fut mis dans une chambre à côté—

Doucement il demanda «pourquoi j’étais tombée»;
«Pour la beauté», répondis-je—
«Et moi, pour la vérité, c’est tout un—
Nous sommes frère et sœur», dit-il—

Et ainsi, comme des parents rencontrés la nuit,
Nous parlions d’une chambre à l’autre—
Jusqu’à ce que la mousse atteignît nos lèvres—
Et recouvrît —nos noms—

Traduction Charlotte Melançon

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

The restless image : a discrepancy between the felt position and the seen position
Rose Finn-Kelcey, 1975
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.