03 mars 2023

Cher journal, je sens que nous sommes attirés collectivement par une énergie sombre. J’ai le sentiment que, sous les aspects d’une vie légère malgré ses contraintes, sous le vernis de notre confort de privilégiés asphyxiés, l’arbre de la décrépitude forme ses racines, alimentées par la sève de nos renoncements. J’ai peur d’assister à la tragédie cosmique, l’expansion universelle de notre inhumanité. Mais cette crainte ne m’empêchera pas de lutter vigoureusement, follement librement, et mes armes seront sans cynisme ni amertume. C’est pleine d’amour, de tendresse et de désirs éternels que je regarderai, sans faillir, sans détourner les yeux, se disperser les résidus stellaires de l’Olympe anéantie.

L’inédit de la semaine : 2ème mouvement

Second round

On retourne à L’Atelier des Bourdons cette semaine, pour le deuxième mouvement de cette suite improvisée en public chez les merveilleuses Marie-Christine Mazzola & Gaël Ascal ! Retrouvez le premier mouvement ici, et rendez vous là pour retrouver l’intégralité à venir (c’est carrément un voyage dans le temps, vers une sorte de futur antérieur, balèze, j’adore les hyperliens). Bon, maintenant que tout cela avance, il va falloir trouver un titre à cette folie. Alors à toi de jouer, entre deux pas de danse tu vas trouver le temps de nous suggérer des idées, j’en suis sûr. Écris-nous à cette adresse : jaiuneideepourlenomdevotresuiteimprovisee@gromail.mail, et si ta proposition est retenue on t’offre un an de cours de flamenco à Château-Chinon. Elle est pas belle la vie ?

XIII – Bohémiens en Voyage

La tribu prophétique aux prunelles ardentes
Hier s’est mise en route, emportant ses petits
Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits
Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes.

Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes
Le long des chariots où les leurs sont blottis,
Promenant sur le ciel des yeux appesantis
Par le morne regret des chimères absentes.

Du fond de son réduit sablonneux, le grillon,
Les regardant passer, redouble sa chanson ;
Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,

Fait couler le rocher et fleurir le désert
Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert
L’empire familier des ténèbres futures.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal (1857)

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

Golgatha
Katharina Heise (Karl Luis Heinrich-Salze), 1918
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.

03 février 2023

Cher journal, je sens que je suis au début de quelque chose. Je ne sais pas. Je cherche, je ressens, je rechercher, attentive aux interstices, à l’infime, avide du vertige, tendue par l’angoisse inévitable de ne rien trouver, pas même le silence, moins que le vide et l’ignorance. Qu’y a-t-il derrière ma peur ? J’espère y trouver un atome de vérité, le débris d’une délicatesse, l’authentique odeur d’une lumière vive, l’éclat du temps fragmenté… Rien que le grain d’un geste fou, que je pourrais faire germer en mon cœur, au chaud de mon corps, à l’abri de la fiction, authentique danse de vie, sève vigoureuse qui, plus tard, peut-être, passionnément, à la folie, deviendra pure énergie.

L’inédit de la semaine : 1er mouvement

La danse du crabe ?

Nous voici de retour en trio cette semaine avec une pièce inédite, youpi, enregistrée en public au cours d’un concert entièrement improvisé à l’Atelier des Bourdons le 15 janvier dernier. Énorme merci à Marie-Christine Mazzola & Gaël Ascal pour avoir organisé ce concert ♡ Et merci également aux merveilleux spectateurs de tous ages pour leur écoute si précieuse, c’était une première pour nous, et ce fut un bonheur immense ♡ De cette folle soirée nous sommes en train d’extraire une suite dont voici le premier mouvement. Alors oui, tout le monde dansait au concert, donc si tu restes assis devant ton ordi, c’est toi qui perds !

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I died for Beauty —but was scarce
Adjusted in the Tomb
When One who died for Truth, was lain
In an adjoining Room—

He questioned softly « Why I failed »?
« For Beauty », I repliesd—
« And I —for Truth —Themself are One-
We Bretheren, are », He said—

And so, as Kinsmen, met a Night—
We talked between the Rooms—
Until the Moss had reached our lips—
And covered up —our names—

Emily Dickinson

J’étais morte pour la beauté, mais à peine
Etais-je installée dans la tombe
Qu’un autre, mort pour la vérité,
Fut mis dans une chambre à côté—

Doucement il demanda «pourquoi j’étais tombée»;
«Pour la beauté», répondis-je—
«Et moi, pour la vérité, c’est tout un—
Nous sommes frère et sœur», dit-il—

Et ainsi, comme des parents rencontrés la nuit,
Nous parlions d’une chambre à l’autre—
Jusqu’à ce que la mousse atteignît nos lèvres—
Et recouvrît —nos noms—

Traduction Charlotte Melançon

Gros bisous,
Frédéric, Matthias & Sylvain.

The restless image : a discrepancy between the felt position and the seen position
Rose Finn-Kelcey, 1975
ENORME merci aux Tipeuses/eurs de cette semaine :
Marionette & ses moutons, Anouck & Nicolas, Odile & Christian, Gilles & Dominique, Claude & Cédric, Didier, Kali, Céline & José, Geneviève & Laurent, Lydie & Jean-Georges, Anne & François, Catherine & Daniel, Anne-Laure, Maarite & Charles, Jeanloulou, Anja, Estelle & Antoine, Nathalie & Fabien, Sufei, Isabelle & Olivier.